Alice dans un EHPAD
Mise en scène Charlie Windelschmidt
D’après Lewis Carroll
Traduction Henri Parisot (éd. Flammarion)
Avec Anaïs Cloarec, Anne-Sophie Erhel, Véronique Héliès, Chloé Lavaud-Almar, Alice Mercier, Valéry Warnotte
Moins connue qu’Alice au pays des merveilles, cette suite lance la jeune héroïne sur un échiquier initiatique des plus baroques. Le temps, l’espace et la langue sont littéralement détournés, retournés, formant un trio inquiétant. « L’autre côté́ », c’est le cœur de la mécanique théâtrale
proposée par Charlie Windelschmidt et son équipe. Dans cette variation, « l’autre côté » n’est que l’envers de la représentation, un antimonde au cœur duquel Alice peut enfin se voir, et s’entendre, si tant est qu’elle accepte de perdre sa place. Car de pion elle veut devenir reine et c’est dans ce
qui semble être le souvenir d’un EHPAD que cette ambitieuse récalcitrante fera sept rencontres fantastiques mais décevantes. Ces vielles figures fanatiques de latex soignent leur férocité : leur (trans)mission semble consister à obsessionnellement secouer Alice pour lui faire perdre la
sensation de sa propre personne, mais aussi, et paradoxalement, la projeter, fut-ce avec tyrannie, hors des pièges du langage pour y inventer sa propre parole, pour y entendre autre chose que ce à quoi elle s’attend. L’auditoire chute alors, en une mystérieuse traversée, au cœur d’une arène
délirante où si l’on se cogne, c’est toujours à soi-même, car parler c’est ici apprendre à se battre.